València, 15.09.2018
La région Méditerranée se trouve dans une situation géopolitique critique : les conflits, anciens ou récents, et les tensions s’y accumulent, les inégalités économiques et sociales persistent et, en conséquence, les flux migratoires et les drames humanitaires afférents s’accroissent.
Cependant les enjeux géopolitiques et géostratégiques dépassent le cadre du seul espace méditerranéen. La région subit l’ influence de la Russie, des États Unis et de plus en plus de la Chine. Pourtant si le clivage Nord-Sud entre les pays qui bordent la Méditerranée s’accentue, l’idéal de fondation d’ un espace régional intégré demeure.
La FACM a pour ambition de promouvoir une citoyenneté commune a l´échelle méditerranéenne, d’organiser un mouvement des citoyens de la Méditerranée pour contribuer au changement des rapport économiques et politiques entre pays du Nord, du Sud et de l’Est et à l’intérieur de chaque pays, mais aussi pour promouvoir la démocratie et le respect des droits humains. La perspective à long terme est de bâtir une communauté des peuples méditerranéens pour la prospérité et la paix dans la région.
Pour cela, la FACM a développé un espace citoyen méditerranéen fondé sur des valeurs et des principes forts de reconnaissance des droits citoyens et humains essentiels et fondamentaux inscrits dans la « Déclaration universelle des droits de l’homme » des Nations Unies.
Les bombardements ne cessent de s’intensifier en Syrie du Nord. La ville d’Idlib, dernière bastion de l’opposition syrienne, ainsi que sa campagne, sont devenus la nouvelle cible de l’aviation russe et des forces terrestres iraniennes et syriennes inféodées au pouvoir de Damas. Une petite ville comprenant d’habitude 250 mille habitants, abrite depuis quelques années plus de 3 millions de civils dont une majorité de déplacés. Les hôpitaux ainsi que les dispensaires ont été les premiers objectifs à détruire et actuellement la majorité de ceux-ci sont hors service. Sous prétexte de déloger dix mille membres des groupes radicaux, des millions de civils sont menacés de mort. La ville et sa région payent le prix fort pour leur engagement ferme dans les manifestations pacifiques qui ont annoncé le début de la révolution syrienne avant qu’elle ne se transforme en massacre. La FACM alerte les peuples de la Méditerranée ainsi que les institutions officielles sur la catastrophe humanitaire qui s’annonce et qui risque de se dérouler, comme ses prédécesseurs, dans l’indifférence totale de ladite communauté internationale. Des dizaines de milliers de civils vont être très bientôt, à nouveau, sur les routes de l’exode de l’espace méditerranéen.
Dans un contexte de répression globale la question nationale palestinienne, qui a été un catalyseur des développements politiques régionaux, a perdu sa centralité.
Ceci a permis à l’Etat d’Israël et aux États-Unis de prendre des initiatives dommageables pour la stabilité de la région : accélération de la colonisation, marginalisation de l’OLP et de l’Autorité palestinienne mais aussi récemment les provocations constituées par le transfert de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, autant d’évolutions qui sont sources de tensions et qui peuvent provoquer des situations explosives.
La FACM condamne la décision des États-Unis de diminuer les aides aux camps de réfugiés en Palestine qui compromet gravement la survie de six millions de personnes dépendant de cet appui pour bénéficier d’une aide sanitaire et d’une éducation
La FACM dénonce la vente d’ armes à des pays engagés dans des conflits armés tels ceux des coalitions opérant dans le Golfe arabo-persique conformément au recommandations des instances internationales et plus particulièrement le Traité sur le commerce des armes (TCA3) de l’Organisation des Nations unies sur le commerce international des armements conventionnels de 2013.
Après l’enthousiasme soulevé par la vague des révoltes arabes, l’autoritarisme semble se réinstaller au Sud et à l’Est de la Méditerranée. Le Conseil consultatif de la FACM exprime sa préoccupation face à la situation critique des libertés et des droits humains dans ces régions où, à quelque exception près, l’Etat de droit est souvent bafoué, la presse libre est muselée et le système policier est de retour.
Il y a plus de 65 millions de migrants dans le monde actuellement. La FACM réitère la nécessité de faire appliquer le droit international concernant la défense des droits humains et pas seulement d´en faire une question morale.
Nous demandons aux gouvernements qu´ils se souviennent de leurs engagements à cet égard et qu’ils appliquent ces droits humains également à toutes les catégories de migrants.
Nous exprimons notre volonté de faire établir comme une priorité le secours en mer Méditerranée des vies humaines, une action qui doit être considérée comme une responsabilité globale.
Nous sommes attachés à ce que l’aide aux migrants ne soit pas considéré comme un délit et pour cela nous proposons que les différentes législations nationales soient modifiées dans ce sens.
Les élections qui se sont déroulés dans différents pays européens ces dernières années ont fait apparaître une montée des partis populistes, voire d’extrême droite, dont certains sont désormais au pouvoir. Profitant de la défiance grandissante de certains citoyens vis à vis des partis politiques traditionnels et exacerbant leurs inquiétudes, notamment concernant l’immigration et les réfugiés, ces partis remettent en question dans leur programme et leurs discours bon nombre de nos droits et institutions. Ils représentent dès lors un défi pour notre cohésion sociale et notre modèle démocratique et nuisent à la politique de l’Union européenne en Méditerranée.
Le Conseil consultatif appelle les responsables politiques européens à prendre la mesure de cette menace. Il importe de rappeler que la démocratie et les droits humains ne sont jamais définitivement acquis et nécessitent une vigilance accrue. Il est du devoir de ces responsables de remobiliser nos démocraties autour de projets politiques audacieux et inclusifs.
Ces différents constats sont affligeants et portent au pessimisme. La jeunesse constitue certainement, du fait de son ouverture sur le monde et de sa propension à la générosité, un atout pour identifier des solutions porteuses d’espoir.
Nous rappellons le message d’Edgard Morin, membre du Conseil consultatif qui a affirmé lors de son discours d’ouverture à la rencontre de l’ACM en Tunisie en 2011 :
« La Méditerranée est un espace de valeurs de solidarité unique au monde, des valeurs de fraternité fortes et des valeurs d’honneur qui sont aujourd’hui capitales. Dans ce sens l’ACM est une pierre à ce merveilleux édifice et un projet pour le futur » .
La Déclaration à PDF